Directive délais de paiement

Une proposition de loi relative aux délais de paiement dans les commandes publiques vient d’être déposée à l’Assemblée Nationale dans le but de rappeler aux administrations publiques leurs obligations en la matière.

À cette occasion, il peut être important de rappeler que la nouvelle directive européenne 2011/7/UE sur les délais de paiement, qui doit être transposée par les États membres avant le mois de mars 2013, prévoit une majoration supplémentaire d’un point du taux de référence de la Banque centrale européenne et une indemnisation forfaitaire minimum de 40 € pour les frais de recouvrement à laquelle pourraient s’ajouter d’éventuels autres frais d’indemnisation tels que des frais d’avocats ou de conseil en recouvrement.

Quels sont donc les enjeux du non-respect des délais de paiement pour les opérateurs économiques et pour les pouvoirs adjudicateurs ?

Les retards de paiement ont des effets négatifs sur la trésorerie des entreprises car les liquidités sont indispensables à la vitalité d’une entreprise et les coûts d’un financement externe (cession, nantissement de créance ou subrogation) ne sont pas compensés par les intérêts moratoires dont le taux est rapporté à une année dans la formule de calcul.

Les retards de paiement peuvent donc avoir un impact sur la croissance et le développement des entreprises, notamment des PME (Small Business Act) de surcroit dans une période de ralentissement économique.

Pour les pouvoirs publics, l’enjeu est triple:

1) ils doivent en premier lieu être exemplaires et respecter les dispositions légales.

Le versement d’intérêts moratoires en cas de dépassement du délai de paiement est une dépense obligatoire. La directive européenne invite d’ailleurs les pouvoirs publics à renforcer la sensibilisation et la transparence en ce qui concerne cette obligation.

2) ils ont également une forte responsabilité envers les entreprises au regard du poids de la commande publique dans l’économie.

3) ils doivent enfin maîtriser leurs dépenses dans un contexte tendu. La commande publique représente en effet environ 100 milliards d’euros par an. Avec le taux peu élevé actuel de la BCE, un seul jour de retard représenterait (sans les 40 € forfaitaires et les éventuelles demandes indemnitaires) une somme de plus de 24.6 millions d’euros (100 milliards x 1/365 x 9/100)

Il est donc très important de respecter les délais de paiement tant pour la croissance des entreprises que pour la maîtrise des finances publiques.

Que peut-on faire pour respecter les délais de paiement et ne pas avoir à payer d’intérêts moratoires ?

Les processus de paiement peuvent s’avérer complexes. Si on prend le cas des marchés de travaux avec une maîtrise d’œuvre externe, la procédure de paiement se découpe en 3 actes :

1) le maitre d’œuvre vérifie le projet de décompte mensuel et établi l’état d’acompte ou le décompte général en faisant ressortir tous les éléments financiers (avance, retenue de garantie, révision provisoire et définitive, pénalités, primes et sous-traitants…).

2) le pouvoir adjudicateur procède ensuite à la liquidation et au mandatement de l’acompte en veillant à regrouper l’ensemble des pièces justificatives afférentes.

3) l’état d’acompte est enfin vérifié par le comptable public avant son paiement par virement administratif.

Tout cela doit être effectué dans un délai maximum de 30 jours calendaires (ou 50 jours pour les établissements hospitaliers) !

Il convient donc d’adopter une organisation structurée et adaptée, à l’instar de ce qui se fait pour la paie pour laquelle il n’y a pratiquement jamais de retard. Les circuits doivent être optimisés. Parmi les pistes possibles, on peut évoquer la dématérialisation des factures et des transmissions comptables, le déblocage de points nodaux dans les circuits de validation et de signature et, bien évidemment la formation de l’ensemble des acteurs.

Quelle est la responsabilité des maîtres d’œuvre dans le circuit global du délai de paiement ? Ont-ils un délai réglementaire ?

Le délai de paiement commence à courir dès la réception du projet de décompte mensuel chez le maître d’œuvre. Le CCAG Travaux fixe un délai de 7 jours au maître d’œuvre pour notifier l’acompte mensuel à l’entreprise et au pouvoir adjudicateur. Mais ce délai n’est pas règlementaire.

Les pouvoirs adjudicateurs n’hésitent donc plus à prévoir ce délai directement dans leurs propres CCAP ainsi que les pénalités afférentes en cas de non-respect des obligations. Certains prévoient même la possibilité d’effectuer ou de faire effectuer, après mise en demeure, les prestations aux frais du défaillant conformément aux dispositions de l’article 3 du décret n° 2002-232 du 21 février 2002 modifié relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics.

À la veille de la transposition de la directive, l’ensemble des acteurs de la chaîne de paiement des marchés publics a donc véritablement intérêt à respecter les délais, car tout retard engendre des coûts financiers directs et indirects.